Communications dans les sessions thématiques ouvertes > #12 L’acceptabilité sociale en pratique : les dispositifs dialogiques comme source de légitimité ?

Contact pour soumission de communication

Corinne GENDRON : gendron.corinne@uqam.ca 

Jacques IGALENS : jacques.igalens@tsm-education.fr 

 

L’acceptabilité sociale : « caminante no hay camino[1] » ?

 

[1] « Toi qui marches, il n'existe pas de chemin » Titre du poème d’A.Machado.

Cadrage et objectif de la session

« L’acceptabilité sociale reste une expression controversée car elle a longtemps été utilisée par les promoteurs pour désigner des stratégies communicationnelles visant à éviter ou à réduire la controverse autour de certains projets » (Gendron et al., 2024). Elle est cependant devenue un enjeu central pour les entreprises cherchant à concilier performance économique, responsabilité sociétale et durabilité. Ce faisant, elle concerne aussi bien la société dans son ensemble que l’organisation et particulièrement l’entreprise. Dans la société, elle peut être définie comme l’« assentiment de la population à un projet ou à une décision résultant du jugement collectif que ce projet ou cette décision est supérieur aux alternatives connues, incluant le statu quo » (Gendron 2014). Dans l’entreprise et dans le cadre de la RSE, l’acceptabilité sociale est souvent assimilée à la reconnaissance par les parties prenantes de la légitimité des projets, décisions et pratiques organisationnelles (Igalens et Point, 2009). Fortement influencée par les perceptions des différentes parties prenantes, la légitimité des projets et des organisations s’avère donc être au cœur des dynamiques d’acceptabilité.

Dans un contexte où les entreprises sont confrontées à une pluralité d’acteurs aux attentes variées (actionnaires, salariés, clients, communautés locales, ONG, etc.), l’acceptabilité sociale est parfois envisagée comme un levier clé pour renforcer la légitimité et la durabilité des organisations. Mais elle ne peut pas être considérée comme un simple outil managérial car elle repose à la fois sur des dynamiques sociales et sur des choix de la part de la direction. Les intérêts contradictoires et les asymétries d’information complexifient la prise de décision et amplifient le risque de dissensus. Ce dernier peut nuire à la réputation, ralentir les projets ou, dans certains cas, entraîner des conflits ouverts. La gouvernance d’entreprise doit donc évoluer pour intégrer des mécanismes favorisant le dialogue, la concertation et la co-construction, afin de réduire ces divergences et promouvoir une meilleure acceptabilité sociale.

En tentant de réduire le dissensus et en rapprochant les points de vue, les organisations peuvent-elles renforcer leur légitimité (Suchman, 1995) et leur durabilité ? Pour ce faire comment peuvent-elles mobiliser des outils de dialogue, favoriser la transparence et prioriser les intérêts communs ? L’intégration des parties prenantes dans la gouvernance ne va pas sans défis (Igalens, 2023). Faut-il, par exemple, donner au Comité des Parties Prenantes une reconnaissance identique (pour prendre l’exemple de la France) au CSE (Comité Social et Economique) ? Faut-il intégrer des représentants des parties prenantes au CA ? Et avec quelle efficacité? Les travaux des juristes pourraient être discutés dans ce cadre (Eberhardt-Toth et al. 2019).

Lors de notre session thématique ouverte nous interrogerons les origines du dissensus (intérêts contradictoires, asymétries d’information, conflits de valeurs) et envisagerons quelques mécanismes de dialogue et de concertation (plateforme multi-acteurs, comités consultatifs, consultations publiques, …) ainsi que diverses stratégies de réduction du dissensus (approche collaborative, transparence, partage d’information, priorisation des intérêts communs, gouvernance inclusive…).

Nous envisagerons également les situations dans lesquelles la gestion du dissensus ne conduit pas à un rapprochement suffisant pour une prise de décision partagée mais acte une position de type « agree to disagree » qui, après avoir clarifié les éléments du dissensus, ne renvoie plus à la confrontation entre adversaires, mais à celle opposant des parties prenantes reconnaissant la légitimité de leurs revendications respectives. Ce type de situation peut ouvrir la voie à diverses modalités de gestion des oppositions telles que l’arbitrage, la médiation, la conciliation, etc.

Notre session permettra à une diversité de parties prenantes d’exposer leur point de vue, notamment les syndicats et les ONG.

Comme dans le poème de Machado, nous pensons que le chemin n’est pas tracé mais qu’il apparaît en marchant.

 

Références

Eberhardt-Toth E., Caby J., Gendron C. et L. Ramboarisata. 2019. « Determinants of the Presence of CSR Committees Within European Boards of Directors », Responsible Organization Review. ROR, 1/2019, p. 34-50. https://think-tank.leclubdesjuristes.com/wp-content/uploads/2018/04/cdj_rapport_role-societal-entreprise_avril-2018.pdf;

Gendron, C. (2014). Penser l’acceptabilité sociale: au-delà de l’intérêt, les valeurs. Communiquer. Revue de communication sociale et publique, (11), 117-129.

Gendron, C., Yates, S., & Friser, A. (2024). L’acceptabilité sociale, une doxa? Évitons de jeter le bébé avec l’eau du bain. Questions de communication, (45).

Igalens, J., & Point, S. (2009). Vers une nouvelle gouvernance des entreprises: l'entreprise face à ses parties prenantes. Dunod

Igalens J. (2023) . Mythes et réalités de la RSE Ed. EMS

Suchman, M. C. (1995). "Managing Legitimacy: Strategic and Institutional Approaches." Academy of Management Review.

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